lundi 10 décembre 2012

Journalisme

J'ai couvert deux drames: la rupture du barrage de Malpasset à Fréjus le 2 décembre 1959 (on parlait de 500 morts) et la destruction du sanatorium pour enfants du plateau d'assy.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Barrage_de_Malpasset

http://fr.wikipedia.org/wiki/Catastrophe_du_plateau_d%27Assy

pour Malpasset on m'a téléphoné du journal à trois heures du matin. Le barrage avait cédé à deux heures. J'ai pris une partie du mon équipement de montagne (duvet, anorak) et je suis parti en voiture. Vers cinq heures je suis arrivé à Fréjus. Il restait quelques maisons éventrées, un camion dans un arbre, des cadavres dans la boue. J'ai fait tout de suite des photos. Un photographe du journal, Antoine Santucci, arrive vers midi et retourne au journal avec ses photos et les miennes. La Marseillaise a ouvert sur huit colonnes à la une. Je devais rester une semaine et publier plusieurs papiers par jour.

Similitudes

Terrible accident aérien en Corse: le 29 décembre 1962 l'avion transportant une équipe sportive de Bastia s'écrase: pas de survivants. Je pars en avion, un Bréguet. Duriani, correspondant de La Marseillaise et adjoint au maire de Bastia, m'attend. Nous partons pour la montagne jusqu'à Ghisoni. Je téléphone le premier papier, on nous invite à dîner, dans le feu de la cheminée cuisent sur des tranches de pain des figatelli. Mais alors que nous sommes devant le feu je m'étonne de voir les femmes, épouses et autres, toutes en noir, debout derrière nous. Je le dis à l'oreille à Duriani, il me fait un signe de main de me taire.

Je suis en Ukraine, invité dans un grand kolkhoze. Le déjeuner est somptueux et les hommes et les femmes qui nous servent portent les beaux vêtements traditionnels mais là aussi les hommes sont attablés et les femmes debout. Je m'étonne un peu en direction de la guide qui m'accompagnait depuis plusieurs jours: "c'est la tradition, surtout ne dites rien! " Je luis dis que l'égalité des hommes et des femmes dans le socialisme actif voudrait que ces femmes soient assises à table: "je vous comprend, me dit-elle et je suis même d'accord avec vous mais nous n'en sommes pas encore là"

Similitudes...

vendredi 30 novembre 2012

Chamonix

Durant les années 50 et 60 j'ai fait des séjours nombreux à Chamonix. Je résidais à l'hotel des guides, un petit hôtel situé en plein centre, contre la Poste et la plus grande charcuterie de la cité et devant La Potinière, brasserie unique et célèbre. Gérard Géry disait que La Potinière et la charcuterie représentaient les deux plus gros magots de Chamonix. L'hôtel appartenait à un guide avec qui je m'étais lié d'amitié et qui est venu me voir à Marseille. Ma chambre, toujours la même, était au deuxième étage et donnait sur l'Arve, grondante de galets, et bien sûr sur les Aiguilles, le Mont Blanc. Les grimpeurs célèbres à l'époque allaient plutôt à l'Hôtel de Paris qui jouxtait celui des guides.
J'étais copain avec Robert Parago qui récemment a reçu un piolet d'or, et Lucien Berardini. Mais aussi Paul Payot, guide et photographe d'une lignée centenaire. Payot est venu à Marseille et nous avons grimpé dans les calanques. Une de mes amies Annie Flechon était célèbre à "Cham", très jolie et excellente alpiniste, nous sommes allés ensemble à L'Arête du Moine, à l'Aiguille verte, pour nous amuser.

Gérard Gery dans les Calanques


Mes amis Jean-Pierre Lindenmeyer et Pierre Temain y ont fait avec plaisir de nombreux séjours.

Photos à venir.

Annie et Patricia étaient là bien sûr. J'ai fait grimper Pat sur le versant du Brevant.

Photo

Je rencontrais souvent Pierre Mazeaud, qui fut un excellent alpiniste et ministre des sports. Il avait été l'un des survivants du drame au Pilier du Frenay et m'en a laissé un long récit.
A cette époque je rencontrais souvent Lionel Terray. Après ses tournées de conférences où il grossissait il me demandait un peu en secret de faire avec lui une "bavante" pour perdre du poids. Je me souviens que nous sommes partis un matin par le premier train du Montenvers. Par la Vallée Blanche nous sommes allés au refuge d'Envers des Aiguilles en haut d'une paroi de deux cents mètres

Photo


Au retour à la balance de la gare du Montenvers il avait perdu quatre kilos.
C'était l'époque où Gaston Rebuffat construisait son châlet au Brévant avec une grande ouverture sur les Drus. Je lui ai donné un coup de main.


photo brouette


Rebuffat était membre de la grande compagnie des guides de Chamonix où il était estimé mais il avait des différends avec les employés municipaux de son quartier qui l'hiver s'arrangeaient pour bloquer sa sortie routière par un mur de deux mètres.


mercredi 14 novembre 2012

St Sever

De St Sever j'ai le souvenir de l'énorme église Abbatiale qui paraissait nous écraser, des magasins sous les arcades et d'une délicieuse pâtisserie où l'on se retrouvait le dimanche après la messe de 11 heures. Ma grand-mère, Maria, était là toute de noir vêtue et des espadrilles passées au blanc éclatantes à ses pieds.
J'ai le souvenir du "château", c'était un petit et beau château de ville. Il avait appartenu au Général Lamarque qui avait sa statue équestre dans un magnifique jardin arboré de tilleuls centenaires qui dominait l'Adour: Morlane.
Le Château appartenait alors à une famille de notables, les Capdeville. Dans le grand jardin qui entourait ce château des paons évoluaient. J'allais les voir souvent et leur plumage en majesté me fascinait.
De St Sever me reviennent les baignades dans l'Adour et les soirées adolescentes où se conjuguaient les premières émotions.
Pour y aller depuis Marseille, je revois le train aux escarbilles que mon frère et moi récoltions en ouvrant les fenêtres du vieux wagon.
De St Sever je revois aussi en mémoire la reine des courses landaises (pas de mise à mort) le double jeu de quilles à six et surtout à neuf, renflées à leur mlieu, qui avaient la taille d'un homme. (c'est tout du moins l'impression que j'en avais)
Il y avait aussi un bar de plein air où l'on y servait le vin blanc acide de la Chalosse. Ce fut là mon premier vin.
Mon frère et moi et tous les cousins Dubrou avions des bicyclettes qui étaient l'objet de belles périgrinations. Autour de St Sever les fermes étaient nombreuses dans ce pays riche. Mais, survivance de l'ancien régime elles appartenaient à des aristocrates dont le Marquis de Gallard. Avec mon frère nous nous étions improvisés électriciens et nous intervenions un peu partout dans les fermes par un petit travail électrique sous baguette. On nous payait en foie gras et en bocaux de cèpes.
Mon cousin Roger est en apprentissage dans la rue principale chez le tailleur de St Sever. Je le revois assis en tailleur sur sa table de travail. Ces trois ans d'apprenti en ont fait un grand dans ce métier et il est devenu à Paris une valeur sûre. Il habillait les grands et surtout les élus. Nous ne nous sommes pas vus bien souvent au cours de ces années mais lors de la cure d'Odette à Dax nous sommes allés à Urrugne en plein pays basque où ils avaient une grande maison.


 (photo)


Avec lui nous sommes allés à Font Arabi.



mercredi 31 octobre 2012

La Famille

Pour ma mère, il faut partir des Dewachter et des Esders, originaires de Mons-en-Bareuil. Ils ont créé les premiers magasins à la même enseigne pour des villes différentes. C'était l'habillement. Ma mère, sa mère est morte en couches, était la fille d'un Louis qui a épousé une Dewachter en secondes noces. Elle n'était donc pas admise dans le saint des saints. Son père a donc mis sa fille dans une sorte de pension à Labry. Nous avons avec ma mère visité la maison où elle a habité et nous avons vu la poncette où elle jouait, c'était l'étalement d'un petit cours d'eau.
Dans l'escarcelle des Dewachter il y avait un très grand magasin au carrefour Canebière-Dugommier et le Modern hôtel sur le quai des Belges. Ma mère avec sa famille a donc habité cet hôtel, elle m'a raconté sa vie d'enfance (le coup des rideaux brûlés) et ensuite parmi eux la tendresse découverte. C'est dans cet hôtel que mon père l'a connue. Il avait fait un stage dans l'aviation en 1917. Il a été blessé à une jambe au "chemin des dames" pendant l'offensive allemande. On l'avait donc envoyé à Marseille pour sa convalescence, et le Modern Hôtel recevait des blessés de guerre. Mon père et ma mère se sont tout de suite aimés. Ma mère a invité mon père à une villa qu'ils avaient à Hyères. Le père Dewachter a confié à mon père la recherche d'adhérents fortunés pour créer une grande brasserie dans le Var. Une belle somme a été trouvée mais le notaire serait parti avec la caisse!
Je suis né à cette époque, en 1920. A l'âge de trois ans ma mère m'a emmenée dans cette belle villa mais truffée de serpents. J'ai des lettres de mon père de cette époque, des lettres très dures pour eux mais pleines d'amour, mon père qui vivait avec quelques sucres par jour a finalement trouvé un emploi à Marseille dans un hôtel: Le Californie. Il y a instauré le change, qui était très fructueux avec une clientèle coloniale qui en était friande. De l'argent est rentré et ils ont acheté un appartement rue Louis Astruc, où mon frère et moi avons passé des années. J'ai été scout et rencontré Gaston Rebuffat et fait mes premières escalades. Mon frère était inscrit à la faculté des sciences, moi j'étais au Lycée Thiers. J'avais pour collègue Pierre Barbizet qui a été directeur du conservatoire de Marseille. A cette époque j'ai passé un double bac lettres et sciences gràce à un ami de mon collègue Lazare qui nous donnait des cours d'une grande qualité. Il s'appelait Bilorevsky et il m'a fait découvrir et aimer l'algèbre.

mardi 18 septembre 2012

Démocraties populaires

J'ai parcouru en journaliste pour des reportages les dites "démocraties populaires": Pologne, Bulgarie, Roumanie, Hongrie, etc... J'ai grimpé dans les monts Tatra à l'invitation du club alpin. Les frontières à l'époque étaient très fermées. Au retour de ces escalades un fonctionnaire a fouillé mes bagages et a trouvé ma corde de trente mètres. "Cable électrique ! c'est très grave !" Heureusement le chef de poste était un alpiniste et il a admiré la première corde de neuf millimètres en nylon qu'il rencontrait.

Sur ces routes encore très peu habitées sinon sauvages et tout juste empierrées j'ai rencontré sur le plateau du Montenegro une Rolls, dans laquelle un britannique et son épouse, de Stratford upon Evon "Nous sommes presque les descendants de Shakespeare", m'a t'il dit en riant, et nous avons bu extrait du coffre un excellent champagne.

Odessa

J'avais demandé à voir les cavaliers Kirghizes dans l'énorme steppe. Je me suis donc retrouvé dans un petit Iliouchine (style Dakota) qui était bourré de voyageurs, de cageots de poules et de coqs. L'avion vole bas au dessus d'une ligne de chemin de fer. On voit des wagons désarticulés. Un certain émoi dans l'avion "ce sont des bandits, me dit la fonctionnaire qui m'accompagnait depuis Moscou. Il y en a beaucoup ? Oui, beaucoup beaucoup!"

jeudi 6 septembre 2012

Retour d'URSS

De retour de ces voyages en "démocraties populaires" qui n'avaient rien de démocraties ni de populaire, j'avais, avec bien des précautions parlé des mendiants de Moscou et d'ailleurs et des douces propositions sur la promenade arborée à Odessa. Je l'ai écrit et le journal a reçu des sacs: on y disait " ce n'est pas possible". Ce l'était pourtant. Au journal Georges Righetti le directeur m'avait dit " tu es un très bon journaliste et je t'apprécie, tu es un bon observateur mais pour l'instant garde ça pour toi "

Budapest

Dans les années 50 j'étais dans les beaux quartiers de Budapest, c'est à dire Buda sur la colline. Une intellectuelle m'a dit: "nous sommes en état de mort politique, et pas que pour nous"

Aragon

Dans les années 50 à la fête de La Marseillaise à Gemenos il y avait selon notre écrit cent mille personnes. C'était exagéré mais à peine. Alain Cuny y disait des poèmes d'Aragon. Celui-ci est monté sur la scène, l'a interrompu: "Alain dit fort bien ces poèmes mais moi je trouve que je les dis mieux !"

Le train de Moscou à Odessa

En URSS, j'étais dans ce train qui mettait 36 heures pour relier Moscou à Odessa. Un paysan m'a sorti de son sac une pomme reinette délicieuse. "C'est une pomme michourinienne qui n'a pas réussi !" Autour d'Odessa j'ai vu des cavaliers Kirghiz qui jouaient avec leur cheval d'une manière absolument extraordinaire. Au même endroit j'ai vu un troupeau de bisons, les soviétiques de l'époque prétendaient séparer les heures de nourriture pour les espèces pour éloigner les prédateurs. Ceci basé sur une constatation réelle du chien de Pavlov.
Science prolétarienne et science bourgeoise: Georges Cognot qui était un philosophe de très bon niveau et lu à la direction du parti communiste avait demandé à Touki de lui faire une conférence sur le thème "science prolétarienne et science bourgeoise" . Touki et Dominique se sont élevés et Toussaint Desanti n'a jamais fait cette conférence. Ensuite Touki et Dominique ont quitté le parti.

mercredi 22 août 2012

Moi

De moi à moi en dehors de la conscience. C'est plutôt un rencontré dans le vécu.
C'est ainsi que je vis normalement (mot stupide) dans le quotidien et du quotidien. Mais je fais appel à une culture, la Grèce de Périclès au IVe siècle avant JC et tout le bazar qui s'ensuivit par dessus l'épisode de ce Jésus de Nazareth pour qui j'ai un faible. Savait t'il qu'il ouvrait une pensée féconde ? J'en doute. Donc le promeneur que je suis va de l'admirable Homère à Vezelay et ses arc-boutants romans, au guépard, au curé de Carry que je trouve intéressant et étrange Michel Savalli, à la récente Nina dont un petit débat dans la nuit d'Aout m'a fait dire: je me régale.
Reste ce temps retrouvé qui foisonne en réalité passée mais présente. Je suis là et je m'y retrouve dans cette fameuse mystification de la conscience de soi.
Reste ces répetitions soudaines que sont les souvenirs douloureux qui accompagnaient la perte d'un être humain ou non dans ce qu'il est convenu d'appeler la mort.
Reste cet avenir qui se déploie, issu de ma volonté et d'une imagination créatrice (Bergson).
Reste tant et tant.

Philosophie

Dans les années 50, Dominique et Touky habitaient à Paris un immeuble du XVIIIe où tout était en bois y compris le vaste escalier qui conduisait aux étages. Dominique et Marguerite Duras étaient amies-ennemies, Marguerite venit souvent voir les Desanti. Après d'assez longues soirées, Marguerite Duras me demandait de la raccompagner, elle était une dévoreuse et j'étais parait-il une jolie proie. Au moment où je partais avec Marguerite, Dominique me soufflait à l'oreille "Fais très vite, je te surveille à ma montre!"

Vie Universitaire

Hiver 1943, Aix en Provence.
Mes professeurs: André Palliard, tenant de la chaire de philo et Louis Lavelle et Ernest Psichari "l'homme du désert".
Nous sortions de la salle enfumée des "Deux Garçons" où l'on travaillait au chaud, il y avait un très gros poële, et où l'on bridgait, pour une promenade dans la nuit étoilée d'hiver conduite par le prof. Il discourait tout en marchant, c'était de la bonne philo et il s'arrêtait tout à coup: une question ? J'étais toujours un peu agressif et amusé "ça c'est Dubrou !" et il enchaînait "désolé de vous contredire chèr élève, mais vous n'y êtes pas du tout!" Dans le noir, j'essayais de mémoriser sa réponse.

mercredi 1 août 2012

Armée

J'avais rendez-vous avec Dominique Desanti à l'extérieur du Café de Flore, face à l'église de St Germain des Prés. Jean-Paul Sartre est passé, il l'a appelé et nous avons échangé quelques mots.
Ce même jour j'avais rendez-vous avec un officier dépendant de Michel Debré, ministre des armées.
Je devais visiter Taverny. C'était le centre de la défense aérienne française et des premiers Mirage IV et autres. Le centre se trouvait à vingt mètres de profondeur et j'ai assisté sur écran à un exercice d'interception. Là on m'a dirigé pour ma région à un officier qui assurait les relations avec la presse, le colonel Pelisson. C'est par lui que j'ai pu accéder au plateau d'Albion au dessus d'Apt, où se trouvaient une douzaine de missiles balistiques, portée 3000 km c'est à dire Moscou. La guerre froide commandait. Au plateau d'Albion on m'a assuré que je pouvais descendre le long d'une fusée par un petit ascenseur. C'était étonnant et donnait le frisson.
Je suis allé ensuite à Rustrel au pied du plateau où se trouvait le poste de commandement. J'ai vu là après un cheminement par un petit train le local où se trouvaient deux officiers. L'ordre de tir en cas de conflit nucléaire venait du président de la république selon un fameux code qui existe toujours. En cas de riposte d'un tir nucléaire sur le plateau d'Albion les officiers pouvaient sortir par un système de couloirs digne des pyramides. Mais pour aller où ? "Comme tout le monde", me dirent t-ils, en ajoutant "c'est le pari de la dissuasion. Ca marche ou ça ne marche pas".
Dans ce théâtre dramatique et stupide les choses aujourd'hui ont-elles changé ?

Le Colonel Pelisson


J'ai fait partie d'une commission à la direction du parti communiste sur l'armée et la nation. Je suis allé trois fois place du colonel Fabien pour un avis sur l'armée. J'y ai rencontré chaque fois Georges Marchais.

vendredi 20 juillet 2012

Festival d'Avignon

J'ai suivi le Festival durant dix ans au moins, j'ai participé au débat du verger et à ceux de la salle de l'Hôtel de Ville. J'ai connu "le festival en espadrilles", une vision que Jean Vilard avait du théâtre populaire. J'écrivais beaucoup sur la jeune vie de cet événement théâtral. J'ai vu un jour Jean Vilard qui sur la scène ne maîtrisait pas bien son texte de Richard II le lire feuillet en main et le jouer en même temps. J'ai Dîné quelques fois avec Vilard et Gerard Philippe au restaurant de l'Hotel de France, des conversations ou l'on riait beaucoup. Ma fille Patricia me rejoignait et elle a participé à des débats avec le Parti Communiste. En 1968 elle était là à la représentation de "Messe pour le temps présent" que Vilard avait demandé à Béjard. Au début de la représentation un groupe de jeunes excités s'en est pris à Maurice Béjard, trop classique à leur entendement, ils avaient interrompu la représentation du Sacre du printemps. Ils glapissaient sur deux ou trois rangs derrière moi. Je ne sais ce qui m'a pris, j'étais fort en colère et je leur ai crié "Ah vous, les grandes folles, ça suffit !" mais tout de suite je me suis levé et repris en leur disant toutes mes excuses. L'un d'eux s'est levé "Nous les acceptons volontiers, mais cher débatteur, vous l'avez dit!"

Saint Tropez

Vers le milieu des années 50, j'avais décidé de faire un reportage sur ce Saint Trop' naissant. J'étais logé chez un ami et camarade hôtelier. J'étais allé jusqu'à la grande plage déserte, je m'y étais baigné et ressorti très vite, l'eau était très froide et je n'aime pas ça. Au soir j'avais rendez-vous chez Senequier qui grandissait à peine. Sur le quai, mon hôtelier me dit tout à coup: " tiens voilà Colette. Je la vis forte, charpentée, avec une incroyable chevelure. Mon hôte la connaissait. "Ah vous êtes journaliste, me dit-elle, que venez vous faire dans ce coin perdu ? Pour moi ? c'est beaucoup trop mais je pourrais vous recevoir à la Treille Muscate. Tout le monde connaît le chemin."
J'ai du repartir de St Trop' le lendemain, rappelé par des dirigeants auxquels St Trop et peut-être Colette ne leur disaient pas grand chose.
C'était l'époque où Maurice Thorez avait appelé à produire le charbon avant tout pour aider au redressement du pays. Il disait aussi: "Il faut savoir arrêter une grève"


A bord du Litva avec Maurice Thorez et ceux qu'il m'avait présentés comme les apôtres, ses fils Jean, Pierre et Paul.


Alès

A Alès lors de la grande grève des mineurs en 1948 je suis descendu pour un reportage sur la dure condition de travail dans le puits de Roche-belle. A cent mètres de profondeur ils travaillaient à demi couchés dans la traille, il y faisait près de 50°. A la remontée j'ai eu droit à une ovation des mineurs, c'était très émouvant.

Résistance

Dans les Cévennes en 1943, avec une partie du maquis FTP nous sommes allés reconnaître les pentes de l'Aigoual, nous y avons bivouaqué et je me souviens que le matin je me suis rasé à l'eau très froide au bord d'un torrent.

Saint-Jean Baptiste

A Dax le 24 juin, jour de la Saint-jean Baptiste, c'était la fête patronyme de mon frère Jean, dit John. J'étais à Dax, le curé tout jeune avait fait faire un grand feu sur une île de l'Adour, il a souhaité la st Jean à mon frère à genoux. J'avais joint mon frère avec l'un des premiers téléphones portables.

vendredi 13 avril 2012

Souvenir de guerre

Les affaires et les biens des Godzahl avaient été mis sous séquestre par le comité aux affaires juives. A la libération Lazare voulait retrouver celui qui avait été mis à la place de son père et l'abattre. J'étais contre mais j'ai accompagné Lazare à l'adresse qu'on lui avait donnée rue consolat. Fort heureusement il n'y était pas.

Toujours dans cette fraîche libération nous sommes allés voir la grande villa où son père habitait et où j'étais venu pour un chocolat lors de notre lycée. La villa avait été pillée, j'y retrouvais des communistes d'endoume qui nous chapeautaient mais parmi les pilleurs, un petit groupe disait "ça n'a aucune importance c'était la villa d'un juif" . Lazare s'est précipité sur l'un des pilleurs et a failli l'étrangler.
L'un des communistes d'endoume nous a dit "vous voyez ils sont devenus tous pourris"
Ce n'était pas faux: l'idéologie nazie à travers Pétain et les autres avait commencé à pénétrer.
Lazare était un mauvais grimpeur mais un grand physicien. Il devait être nominé pour le Nobel, à la fin de sa vie il avait été nommé parmi les dirigeants de Saclay pour la recherche fondamentale.
Il  a participé à la diffusion de la Marseillaise clandestine. Les lignes de plomb étaient sorties des ateliers du Petit Provençal et du Radical par une équipe courageuse dirigée par un claviste qui s'appelait Aubray. Le montage sur forme avait lieu à Morgiou dans un cabanon appartenant à Charles-Emile Loo qui fut dirigeant de la SOCOMA qui était une société d'acconage.
L'embauche des dockers se faisait par une organisation publique, le BCMO, mais les socialistes de l'époque avaient créé cette SOCOMA pour à la fois éviter les grèves et avoir accès à une affaire fructueuse.

Un jour de 1943 nous sommes allés à son cabanon avec Lazare pour aller chercher les journaux clandestins La Marseillaise et Rouge midi. C'étaient des pêcheurs de Morgiou qui transportaient les journaux dans des papiers huilés sous les paniers à poissons avec de petits ânes. Avec Lazare nous avions fait de l'escalade et la direction FTP nous avait doté de deux mitraillettes STEN que nous avons déballées chez Charles-Emile Loo en arrivant au Cabanon, et il s'est mis en colère en disant "j'avais dit jamais d'armes"

En 1943 à yssengeaux dans l'Auvergne je descends du car, sur la petite place des allemands en grande quantité, alors je m'éloigne, ils crient "HALT" je m'élève dans le vieux village, je cours, je saute dans un jardin ou se trouvait un vieux couple, je leur crie "c'est la résistance, la France, De Gaulle !" et alors tous les deux d'une grande voix à l'adresse de mes poursuivants "Il est là !"
En courant j'atteins la lisière d'une forêt, il y avait beaucoup de neige, les allemands s'arrêtent, pas un coup de feu.
J'avais à joindre un paysan que je connaissais. Il me dit: "ici il y a un puissant maquis et ce sont de vieux soldats mobilisés. Ils ont joué la sécurité. Si nous tirons ils vont répliquer et nous massacrer"
Lazare et moi nous nous retrouvons à Aix-en-Provence à la Faculté, nous sommes contactés par des Francs Tireurs et Partisans. Nous partons pour les Cévennes. A son arrivée au FTP Lazare a été contacté par une organisation Juive mais il resté plus ou moins avec moi jusqu'à la libération.
Il a participé à la plupart de nos combats sauf au Passage de La Madeleine dans l'Hérault contre la division Das Reich qui remontait de Toulouse vers la Normandie. J'étais là, combattant tout neuf des grandes opérations avec des anciens des brigades internationales, de la guerre d'Espagne. C'est là, comme je tremblais plus ou moins sous le feu nourri qui faisait tomber des branches, que l'un d'eux m'a dit avec son accent: "tu es un bon tireur, aussi faut-il vaincre la peur: respire lentement et à fond, ça ira mieux!"

mardi 27 mars 2012

Souvenirs avec ma mère

Après la mort de mon père j'ai emmené ma mère partout où j'ai pu. Je lui faisais faire de longs séjours à Chamonix. Malgré son âge elle était très leste et volontaire. Ainsi je lui ai fait descendre les Egralets jusqu'à la mer de glace. Je l'ai emmenée en Lorraine, son pays natal. A cent ans, Air Inter lui avait offert le voyage jusqu'à Strasbourg. Durant le voyage, nous avons été invités par l'équipage dans le cockpit; ma mère était ravie, voyant les pilotes les mains croisées elle avait dit "Mais qui est ce qui guide l'avion ?" L'un des deux avait répondu "Madame c'est Charlie"

mardi 20 mars 2012

Mains de Luthiers

"C'est parce qu'il est intelligent que l'Homme a une main, et c'est parce que je décris la main qui écrit ce que je décris que cette même main me désigne comme humain."

Aristote dans "Les parties des animaux"

http://fr.blurb.com/bookstore/detail/2642818

1996

Odette et moi, au Mas de Rey pendant les rencontres de la Photo en Arles lors du marquage des jeunes taureaux.

J'ai suivi les rencontres internationales de la Photo d'Arles depuis le début et j'ai été invité dans les meilleures conditions car La Marseillaise avait une grosse diffusion en Arles et dans la région. Mon point d'attache était le bel hôtel Arlatan dont le propriétaire était Mr Dujardin, mort en voiture d'une crise cardiaque.
J'ai pu rencontrer les plus grand photographes dont Brassaï, etc... J'avais en Arles de bons rapports avec Michel Vauzelle, alors adjoint à la culture du maire communiste, qui jouait un grand rôle dans les rencontres. Notre point de réunion était le merveilleux restaurant L'affenage, qui existe toujours.

lundi 5 mars 2012

1938

Avec Lazare Goldzahl, on va en vélo à St Nizier dans le Vercors, où on campe.

1939 leçon de mathématiques avec le mathématicien Russe Bilorevsky.

1940 au Lycée Thiers avec Pierre Barbizet je passe le double bac Philo et Maths.

1941 chantier de jeunesse: j'avais demandé Chamonix, on m'envoie à Gap Charance. Au bout de deux mois j'en pars volontairement pour Marseille et St Sever. Mais entretemps je m'inscris à la faculté des lettres d'Aix en Provence pour une double licence Philo et Anglais, je suis inscrit aussi à la Faculté de Droit d'Aix, elle se tenait face à la Cathédrale.
Au cours de deux ans, en courant d'une fac à l'autre, il m'est peu retenu de mes souvenirs sinon des merveilleux cours en droit constitutionnel du Professeur Trotabas.
En 1942 j'ai assisté à la demande des "Gaullistes" à une opération qu'ils avaient monté pour la visite de Philippe Pétain. Celui-ci devait arriver habillé d'une grande toge noire. Un étudiant s'approcha habilement de lui et à l'aide d'une épingle de nourrice il ficha sur la toge un papier où était écrit "à mort Pétain". Celui-ci fit ainsi une cinquantaine de mètres jusqu'à l'entrée où un gendarme arracha le papier.
C'est à Aix durant le printemps 43 que sur l'indication des "Gaullistes" nous partîmes un beau jour pour le maquis.

vendredi 20 janvier 2012

vendredi 6 janvier 2012

La révolution des Oeillets, Portugal 1975


Une vue des grandes manifestations à Lisbonne en 1975, qui ont abouti à la chute de Salazar


Les oeillets au bout des fusils


Helena, professeur de Philo et militante, avec un journaliste de L'Humanité

Alpinisme


L'arête de Cassis à la Grande Candelle 
(1970)




Le refuge d'envers des aiguilles, au dessus de la mer de glace, photo prise par Lionel Terray. (1970)

Discussion avec l'abbé Savalli, curé de Carry le Rouet

En prélude à notre entrevue du samedi 31 décembre:

Plus que la violence directe, on trouve dans les faits divers, les faits de société, un bon marché de la vie. Ils ne veulent pas tuer des humains, ils veulent tuer la vie. Le nazisme en avait fait son étendard. La tête de mort sur le képi des SS. Ces types de véhiculisation sont des instruments utilisés dernièrement lors du 11 septembre 2001 à New-York. Ce fait historique, la négation de la vie, pose une question: comment est-elle possible dans la situation chrétienne ?
André Malraux a dit: "les civilisations à venir seront sacrées ou ne seront pas". Je peux concevoir le sacré, un fait consenti dans la pensée mais qui ne doit pas aller au delà de sa conception provisoire dans le temps.
Je suis pour le dépassement de soi à partir de sa propre réalité. Donc je véhicule l'immanence. Mais comment pourrais-je concevoir la transcendance ? "Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas" (Aragon). La réponse à mes yeux peut être dans la foi.
La foi, un acte d'une volonté sublimée et sublime. En fonction de ce "bon marché de la vie", comment les chrétiens peuvent ils vivre de nos jours ?


Après l'entrevue, les questions que je posais à l'abbé Savalli, je me les posais à moi-même. On est toujours son propre regard comme le soulignait Pascal, au travers de ses réflexions contraires, Spinoza au travers d'un très long échange, Platon par ses dialogues apocryphes et Augustin par ses fausses confessions.
Ceci pour la forme. Reste le contenu.


La réponse ou les réponses: 
lui par la foi et moi par l'exercice donné et dit par la raison.
Mais peut-être lui aussi par un exercice de la raison et moi par la foi, la foi en l'homme.